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A l'ivoir de mes yeux, à mes songes, à l'oubli des heures du sud, au cadran d'un ailleurs parcouru et invisible
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8 avril 2006

Dialogue pour une femme _ Premier chapitre, deuxième partie

" Viens là sous le sapin rabougri, sous la branche qui tombe. Viens à l’ombre de tes craintes cachées, au creux de tes péchés mignons. Viens dans l’antre béant d’un petit trou noir. Plonge, amour, dans l’iris des yeux qui pleure. Il y a dans cette brume l’insouciance de tes premières années. Il y a ta tendre et chère mère qui te sourit. Il y a sa bouche de vingt ans qui tire de chaque côté les petites rides de celle qu’elle a maintenant à soixante. Il y a tout pour te réconforter. Des draps tendus entre les planètes pour amortir la chute que tu fais quand tu bascules par la porte des pays des merveilles. Il y a un sein pour te nourrir. Il y a un soleil d’été et des vagues immortelles qui font leur virgule sans jamais se refermer. Il y a un océan immense qui s’étend sur l’infini. Il y a une île où tu dors pauvres petit Robinson. Une île perdue comme un grain de sable dans une dune qui monte jusqu’au croissant de lune, comme s’il s’agissait d’un sablier à l’envers. Tu accroches ta petite île fantaisiste à la jambe d’un nageur et tu vas te semer contre l’écorce des pins. La plage monte lentement sa crue. Tu en es tendresse. Perdu mais pas seul. Malheureux mais avec des éclats de joies qui te percent le sang. Viens là mon enfant, ma chair étrangère. Viens coller ta peau chaude sur ma terra-incognita. Sais-tu seulement ce que je suis moi qui n’espère plus découvrir d’où je viens ? Sais-tu seulement quel est mon nom, toi qui ne te rappelles plus pourquoi les hommes s’appellent entre eux ? Tu chéris mes formes. Tu dis que je suis ta maison. Mais peux tu croire ce que ressent cette maison lorsque tu la quittes. Une maison vide. Comme un cœur sans âme. Je pars, ma carcasse d’escargot accrochée sur mon dos. Dis moi seulement que je suis la maison que tu aimes habiter. Dis moi, que tu nages dans mes yeux sans jamais te noyer. Dis moi que ton ivresse ne t’enlève pas la raison mais qu’il n’y a pas de raison à me couvrir de tes joies et de tes peines. J’oublierai mon pays, ma patrie, mes parents, mes amis pour garder sur mon sein les larmes que tu as oubliées. Je leur construirai un temple. Je décrocherai un écrin de lune pour les enchâsser. Je deviendrai reine et déesse pour fonder une nouvelle religion, pour que tout le monde croie là où j’ai cru que tu m’aimais. J’irai dans la Perse antiques et chez les princes d’Egypte, je ressusciterai les Carolingiens pour que tous me fassent allégeance. Je chanterai plus haut que la légende du roitelet, je chanterai plus beau que le chant du rossignol pour envelopper de félicité le cœur des autres hommes." ...

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